VERS L’ÉPANOUISSEMENT COLLECTIF DU PEUPLE HAÏTIEN

Position de l’ex-Premier ministre Evans PAUL, en référence à la résolution 2699 (2023) adoptée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies concernant Haïti, le lundi 2 octobre 2023 :

1. Nous saluons les efforts déployés par les États-Unis et l’Équateur pour obtenir ce vote avec une majorité de 13 voix sur 15, tandis que la Chine et la Russie ont choisi de s’abstenir sans exercer leur veto.

2. Nous devons reconnaître que ce vote est une réponse à la dégradation alarmante des conditions sécuritaires en Haïti, caractérisées par des cas d’assassinats, de kidnappings, de viols et de spoliations, ayant obligé des milliers de familles à fuir leurs foyers et à vivre dans des conditions inhumaines. Ce vote appelle à une action d’envergure visant à réprimer la violence des gangs armés, qui déstabilisent le pays, en causant blessures, vols, meurtres et terreur dans la population.

3. Nous soulignons le caractère spécifique de cette mission non onusienne, autorisée par la résolution 2699 du Conseil de Sécurité, mais qui ne bénéficiera ni de financement ni de coordination de la part des Nations Unies. Ce qui témoigne d’une certaine lassitude et même d’une incertitude quant à la réalisation des objectifs visés, après 33 ans et une dizaine de missions des Nations Unies en Haïti (1990-2023), depuis la première mission ONUVEH (Observateurs des Nations Unies pour la Vérification des Élections en Haïti) en octobre 1990, jusqu’à la récente adoption de la résolution de ce 2 octobre 2023, établissant la MMSS (Mission Multinationale de Soutien à la Sécurité en Haïti) sous le leadership du Kenya. Cependant, les résultats, jusqu’à la présence en place depuis juin 2019, de la BINUH (Bureau Intégré des Nations Unies en Haïti), n’ont pas répondu aux attentes, malgré la somme exorbitante de onze milliards de dollars américains engagés que ces missions ont coûtée.

4. Nous comprenons que la profonde crise de société qui affecte les différents secteurs du pays, conduise à la défaillance de l’État, constituant le problème fondamental, dont découle la crise sécuritaire.

5. Nous sommes conscient qu’une mission internationale visant à rétablir la sécurité publique dans le pays doit également être l’occasion de mettre en place un mécanisme institutionnel durable pour la gouvernance du pays. Ce qui implique l’exercice effectif de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire, garantissant des services sociaux tels que la distribution de l’eau, l’assainissement, la sécurité, la justice, l’éducation, la santé, l’emploi, des logements décents, des loisirs, le civisme, ainsi que le progrès économique et social.

6. Nous sommes particulièrement conscients que de tels objectifs ne pourront être atteints sans une implication active des élites politiques, économiques et intellectuelles de l’ensemble du pays et de la diaspora ; et surtout sans la reconnaissance des erreurs accumulées pendant les quatre décennies passées, et la nécessité d’éviter de les commettre à nouveau dans le cadre de cette énième mission. Ce qui implique l’exercice effectif de l’autorité de l’État, la stabilité pour le retour à l’ordre constitutionnel et à la légitimité des futurs dirigeants, facteurs indispensables au mécanisme institutionnel durable de la gouvernance.

7. Nous reconnaissons fondamentalement que la stabilité politique nécessite la promotion d’une véritable culture du dialogue, de la tolérance et du vivre-ensemble, favorisant la paix, la croissance économique et le progrès.

8. Nous signalons avant tout que l’édification de la démocratie repose sur des entités politiques et sociales solides, telles que des partis politiques, des syndicats, des chambres de commerce, des clubs sportifs et culturels, engagés dans des actions constructives, compétitives et instructives, pour l’épanouissement collectif du peuple haïtien.

9. Nous comprenons de manière logique qu’il est essentiel de ne pas imposer une pensée unique, mais plutôt de rassembler les énergies positives dans la bonne direction, minimisant ainsi les effets dévastateurs des forces néfastes. L’objectif primordial est de construire une communauté nationale haïtienne, de bien-être pour tous.

10. Mon vœu patriotique est que cette mission soit enfin la dernière sur le chemin de la reconstruction de notre chère Haïti et de l’aspiration au bonheur du peuple haïtien si durement éprouvé.

Evans PAUL
Port-au-Prince, Haïti, le 6 octobre 2023

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