Cette qualification des Grenadiers pour le Mondial FIFA 2026 offre un répit face aux récits tragiques, souvent en contradiction avec les valeurs humaines, qui dominent habituellement l’actualité haïtienne. Le traitement médiatique mondial revêt cette fois un angle nettement plus flatteur. Le même pays, mais une tout autre narration. Pour une rare fois, Haïti fait la une de la presse internationale pour des raisons positives. Ce, depuis quatre jours, à la suite de sa qualification historique pour la Coupe du monde 2026 de la FIFA.
Ce mois de novembre, évoquant l’exploit de nos ancêtres face aux troupes napoléoniennes en 1803, s’annonçait déjà prometteur pour le football haïtien. La consécration de Melchie Daelle Dumornay comme meilleure joueuse de l’année de la Concacaf (rassemblant les pays d’Amérique du Nord, d’Amérique centrale et des Caraïbes), a été suivie par la distinction de Jonathan David dans la catégorie masculine. Tous deux sont d’origine haïtienne, bien que David évolue sous la nationalité sportive canadienne. À ces honneurs se sont ajoutées deux victoires décisives de la sélection nationale, d’abord contre le Costa Rica (1-0), puis face au Nicaragua (2-0), dans le cadre des éliminatoires du Mondial 2026. Ainsi, 52 ans après sa première participation, Haïti retrouve la plus prestigieuse compétition footballistique au monde.
Ce succès, arraché dans des circonstances particulièrement difficiles (impossibilité de jouer à Port-au-Prince en raison de la violence des gangs, absence de championnat national), a surpris la presse internationale.
Plutôt que les habituelles images de catastrophes naturelles, de violences, d’instabilité politique ou de crise humanitaire, les médias étrangers présentent désormais Haïti comme un symbole d’excellence et de résilience. Ils saluent le talent de ses jeunes joueurs dont Jean-Ricner Bellegarde ou Ruben Providence, les performances des expérimentés tels que Johny Placide et Duckens Nazon, ainsi que le savoir-faire du sélectionneur Sébastien Migné. La joie de vivre du peuple haïtien est également mise en lumière à travers les multiples reportages consacrés aux célébrations populaires. De nombreux experts tentent même d’expliquer cette euphorie surgissant au cœur du chaos.
Le journal dominicain Listín Diario a consacré l’une de ses plus belles pages à cette seconde qualification d’Haïti pour la Coupe du monde, évoquant le long parcours et la rigueur du travail mené par Sébastien Migné, qui en un an et demi, a su convaincre plusieurs binationaux talentueux dont Jean-Ricner Bellegarde et Ruben Providence, de rejoindre l’aventure.
Le Miami Herald met en avant l’élan d’unité nationale suscité par cette victoire, tandis que The Guardian souligne la portée historique d’une qualification obtenue loin de la terre natale. Pour L’Équipe, il s’agit tout simplement d’un exploit provoquant une joie immense parmi les Haïtiennes et Haïtiens, tant au pays qu’au sein de la diaspora. RFI et ESPN saluent l’état d’esprit exemplaire des Grenadiers et la philosophie de jeu instaurée par Sébastien Migné.
« Haïti n’avait pas seulement besoin d’une victoire contre le Nicaragua. Le pays voulait démontrer que, malgré les crises multiples qui l’accablent, il peut encore se relever et garder la tête haute, comme il l’a toujours fait au fil de son histoire tourmentée », écrit l’Associated Press.
Le magazine allemand Kicker évoque également cette qualification, soulignant notamment l’impact du gardien Josué Duverger, joueur du Cosmos Coblence en cinquième division allemande, auteur d’une performance remarquable lors du match nul spectaculaire contre le Costa Rica (3-3) en septembre. De son côté, Bild envisage déjà une possible confrontation historique entre Haïti, l’Allemagne et la Norvège d’Erling Haaland.
Le prestigieux quotidien brésilien Globo met en lumière l’importante réserve de talents expatriés dont dispose Haïti, citant notamment Jean-Ricner Bellegarde (Wolverhampton) et Wilson Isidor (Sunderland). Ce dernier, également de nationalité française, est courtisé par la Fédératiom haïtienne de football. Il n’a pas encore décidé de jouer pour la sélection d’Haïti.
L’écho de cette qualification s’étend jusqu’au Moyen-Orient. BeIN Sports décrit un parcours inspirant, marqué par trois victoires en six rencontres et couronné par un billet pour la grande fête du football mondial à l’été 2026.
L’euphorie atteint son paroxysme dans la presse haïtienne, qui explore toutes les facettes de cet exploit désormais au cœur de toutes les conversations. Cette qualification ravive la fierté nationale. Le Conseil présidentiel de transition, le Gouvernement, les secteurs privé, religieux et universitaire, les partis politiques ainsi que la société civile la saluent unanimement, tout en appelant à consolider cet élan d’espoir et d’unité.
Au-delà de la ferveur populaire, cette qualification rappelle la nécessité, pour l’État haïtien comme pour les acteurs privés, d’élaborer de véritables politiques publiques en faveur de la jeunesse, offrir un encadrement adéquat, construire des infrastructures sportives et proposer des perspectives dignes aux enfants. C’est ainsi que l’avenir du pays pourra être préservé. N’est-ce pas là le meilleur moyen de prévenir la criminalité, la violence et l’insécurité?